Les grandes affaires criminelles.

Les grandes affaires criminelles.

CRIME POLITIQUE.


Ignace Reiss et Rudolf Klement, les suppliciés du NKVD.

 

A partir de 1936, en URSS, la Grande Terreur fait son oeuvre, mangeant ses propres enfants. Staline, paranoïaque comme jamais, depuis l'assassinat de Kirov, se mit à traquer des opposants plus virtuels que réels et décida de porter un coup mortel à toute la vieille garde bolchevik. Des procès à grand spectacle, dits de Moscou, vont commencer dès l'été 1936 à mettre en scène des mises à mort soigneusement préparées par le procureur général Andrei Vychinski, âme damnée de Staline. Le procès des 16, d'août 1936 commença la sarabande pseudo-judiciaire, jugeant 16 dignitaires du parti communiste, dont les deux compagnons de Lénine, Grigori Zinoviev et Lev Kamenev qui furent accusés de crimes monstrueux et exécutés juste après leur condamnation à mort, le 25 août.

Ignace Reiss, espion soviétique travaillant à l'ouest, à la solde du NKVD, fut profondément marqué par cette parodie de procès, envoyant à l'abattoir des bolcheviks historiques, immolés sur l'autel de la paranoïa stalinienne. L'espion qui venait du froid décida alors de rompre avec la Terreur du "Petit Pères des peuples", en envoyant une missive au comité central de l'URSS, le 17 juillet 1937, où il stigmatisait la politique ultra-répressive de Staline, les bourreaux torturant dans les caves de la Loubianka et où il préconisait la rupture avec le géorgien, grand adepte du socialisme dans un seul pays pour revenir à l'antienne internationaliste de Lénine.

Cette lettre fut son arrêt de mort, pour crime de lèse-Staline, le géorgien ne pouvant souffrir d'être mis en cause publiquement. Dans son livre, Mémoire d'un révolutionnaire 1905-1945, Victor Serge raconta que le 5 septembre 1937, accompagné de Henk Sneevliet, communiste néerlandais anti-stalinien puis anti-trotskyste, qui se rallia à la démocratie ouvrière prônée par le POUM d'Andreu Nin, lui aussi exécuté, en Espagne, par les séides de Staline, il devait rencontrer Ignace Reiss, à Reims. Mais Reiss ne vint pas. Dans le train retournant à Paris, les deux hommes, lisant un journal de la veille, découvrirent qu'un homme, avec un billet de train pour Reims dans sa poche, avait été retrouvé criblé de balles près de Chamblades. L'identité du cadavre fut vite retrouvée, il s'agissait d'Ignace Reiss. Quelques jours plus tard, la veuve de l'espion expliquait à Victor Serge, que le jour de sa mort, Ignace avait reçu la visite inopinée d'une militante communiste, amie de 15 ans du couple, une certaine Gertrude Schildbach. Cette dernière fit mine de soutenir son ami dans sa nouvelle ligne anti-stalinienne et lui aurait proposé une petite ballade pour discuter de tout cela. L'ex-espion de Staline, peu méfiant, accepta d'aller faire un petit tour avec Gertrude et ne revint jamais. D'autres anti-staliniens de l'étranger furent aussi liquidés, comme Rudolf Klement, retrouvé dans la Seine, décapité, en 1938.

Certains purent sauver leur peau, comme le sinistre Alexandre Orlov, chef du NKVD dans l'Espagne républicaine, qui fut chargé par Staline de l'extermination des dirigeants anarchistes et trotskystes espagnols. Sentant le vent tourner, il refusa de retourner en URSS et s'enfuit vers les USA, en 1938. Mais les terres américaines n'étaient pas un sanctuaire pour ces ex-espions de Staline, à l'image de Walter Krivitsky, chef du NKVD en Europe de l'Ouest. Voyant que les agents ayant travaillé à l'Ouest disparaissaient les uns après les autres, Krivitsky, à l'image d'Orlov, fit défection et prit le bateau pour les Etats-Unis, en 1938, où il publia un livre: "J'ai été un espion de Staline". En 1941, on retrouva le réfugié dans une chambre à Washington, une balle dans la tête ...

Mais tous ces assassinats étaient passés sous silence par la presse occidentale, selon Victor Serge, car en ces temps de Front Populaire et de montée du nazisme, il fallait préserver le Parti communiste français et le possible allié soviétique.

En cette année 1937, qui vit la mort d'Ignace Reiss, un autre Ignace était chanté par Fernandel.

 

 


FERNANDEL extrait Ignace (1937) "Ignace" par Mystralgagnant_Cinq


30/08/2013
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